Généathème Mai 2020 Métier d’art « ébéniste »

30 mai 2020 3 Par elodie

Alfred Pierre Jean-Baptiste FAUNY ébéniste à Coutances

En ce mois de mai 2020, Sophie Boudarel de la Gazette des ancêtres nous propose de nous intéresser aux métiers d’art pour un nouveau généathème. J’ai choisi de parler d’un ébéniste de ma famille : Alfred Pierre Jean-Baptiste FAUNY. Je m’attarderai principalement ici sur son métier plutôt que sur sa vie que j’aborderai dans un prochain article de la série 16 AAGP.

Informations sur le métier

Il ne faut pas confondre les métiers d’ébéniste et de menuisier, le premier est traditionnellement chargé des décorations délicates sur les bois précieux, tandis que le menuisier fabrique ce qui peut être déplacé (mobilier courant) mais cette différence est surtout marquée avant 1789 où seuls les ébénistes ont le droit de signer leurs œuvres. La Révolution entraine la suppression des corporations et des associations de métiers, les règles disparaissent et permettent ainsi à tout artisan de signer ses travaux comme les restaurateurs, tapissiers et bien sûr les menuisiers.

La frontière entre les deux métiers devient alors très floue, ce qui est accentué par la disparition des clients fortunés des ébénistes, mais aussi par la difficulté croissante de se procurer des bois exotiques comme l’acajou, difficulté causée par le blocus anglais pendant les guerres de l’Empire.

A partir du règne de Louis-Philippe, avec l’avènement de l’ère industrielle, les meubles sont de moins en moins fabriqués par un seul artisan, la production se faisait dans de vastes ateliers et le nom de l’ébéniste gravé à l’intérieur d’un meuble est remplacé par la marque de l’entreprise. Quelques ébénistes continuent cependant d’exercer seuls ou en famille mais travaillent maintenant sur tout type de bois.

Exemple d’outils utilisés par les ébénistes à la fin du XIXe siècle

Les menuisiers, quant à eux, s’orientent de plus en plus vers l’agencement des maisons avec la pose de fenêtres, de portes, etc… Ainsi paradoxalement se recréée la frontière entre les deux métiers leur donnant le sens qu’on leur connait aujourd’hui.

Un petit mot sur une dernière profession travaillant le bois souvent associée aux deux autres : le charpentier. Celui-ci est chargé de l’ossature de la maison, de la charpente, que ce soit dans une simple grange ou un bâtiment prestigieux.

Alfred Pierre Jean-Baptiste

Alfred Pierre Jean-Baptiste FAUNY, archives de famille

Alfred Pierre Jean-Baptiste est né le 12 avril 1876 à Saint-Nicolas-de-Coutances, commune limitrophe de Coutances aujourd’hui rattachée à la ville. La première mention de son métier d’ébéniste figure sur sa fiche matricule en 1896. Il est alors domicilié au 68 rue de l’Ouest à Coutances. Mais il n’a certainement pas commencé à exercer à l’âge de 20 ans, comme beaucoup de jeunes, il a dû être placé en apprentissage, sans doute dès l’âge de 13 ans, apprentissage qu’il a validé en présentant une paire de sabots qui sont toujours dans la famille.

Je ne sais pas comment il s’est orienté dans cette voie car son père était cultivateur et je ne connais pas d’autres membres de la famille ayant exercé cette profession avant lui.

D’après les informations que j’ai pu récolter auprès de ma famille, il n’avait pas de magasin mais travaillait directement sur commande, de chez lui où se trouvait son atelier (5 Bis rue Pisquiny à la fin de sa vie), puis livrait ses créations à ses clients. Pour se faire connaître il exposait ses œuvres dans les foires et le bouche à oreille étaient beaucoup utilisé. Il avait visiblement plusieurs employés rejoints rapidement par ses propres fils : Raymond, Paul et Roger. Au plus fort de l’activité le carnet de commandes était rempli sur plus d’un an.

Certaines pièces existent toujours aujourd’hui, que ce soit dans le domaine privé ou public.

Il est resté quelques meubles fabriqués pour sa fille, Germaine (mon arrière-grand-mère) dont ont hérité mes grand-parents, notamment deux cosys et un buffet en chêne.

On peut également voir son travail dans plusieurs églises comme celle de Cerisy-la-Salle où il a réalisé les têtes de bans, à Saint-Pierre-de-Coutances pour laquelle il a sculpté les fonts baptismaux et d’après plusieurs témoignages il a aussi œuvré pour la cathédrale Notre-Dame de Coutances avant la 2ème Guerre Mondiale où il se rendait à pied de chez lui, mais cette information mérite quelques approfondissements.

D’autres meubles doivent encore se trouver chez des particuliers, en effet il a fabriqué un grand nombre d’armoires normandes. Celles-ci étaient traditionnellement apportées en dot par la future femme et étaient connues pour leur résistance au temps, faites en bois massif et non en contreplaqué, d’une dimension impressionnante (généralement 2 m de haut, pour 1,50 m de large et 0,60 m de profondeur) avec une double porte. On y rangeait le plus souvent le linge ou la vaisselle, c’est pour cela qu’elles ne finissaient pas forcément dans la chambre à coucher. Malgré leur taille, elles sont en fait assez faciles à déménager car elles sont assemblées grâce à des chevilles et non des clous ce qui permet de les démonter assez aisément.

Exemple d’armoire normande, celle-ci n’a pas été faite par ma famille

Je voudrais remercier particulièrement Annick, Michel et Monique, les petits-enfants et arrières-petits-enfants d’Alfred, qui m’ont apporté beaucoup de précisions et d’anecdotes pour cet article.

Sources :

  • Métiers d’autrefois de Marie-Odile Mergnac
  • Actes d’Etat civil
  • Archives familliales